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Celle que vous croyez de Camille Laurens
Editions Gallimard - Collection Blanche - Date de sortie : 1er janvier 2016 - ISBN 9782070 143870 - 186 pages
4è de couv'
Vous vous appelez Claire, vous avez quarante-huit ans, vous êtes professeur, divorcée. Pour surveiller Jo, votre amant volage, vous créez un faux profil Facebook : vous devenez une jeune femme brune de vingt-quatre ans, célibataire, et cette photo où vous êtes si belle n'est pas la vôtre, hélas. C'est pourtant de ce double fictif que Christophe - pseudo Kiss Chris - va tomber amoureux.
En un vertigineux jeu de miroirs entre réel et virtuel, Camille Laurens raconte les dangereuses liaisons d'une femme qui ne veut pas renoncer au désir.
Mon avis
Les premières pages peuvent dérouter, mais si l'on poursuit la lecture on plonge dans cette histoire vertigineuse, dans les tiroirs qui la composent de manière magistrale. Histoire dans l'histoire, réflexion sur l'écriture, sur la femme qui vieillit, sur l'image que la société (les hommes surtout !) en ont. La construction du roman est tout simplement bluffante. Qu'est-ce qui est vrai, réel, virtuel ? Quelle est la réelle histoire ? racontée par qui ?..
A certains moments, j'ai été dérangée, bousculée, par les considérations (parfois cruelles) sur la condition de la femme notamment, sur le désir, l'amour. Ca amène à la réflexion, c'est sûr !! Peu de personnages, dont on suit le chemin sans vraiment s'y attacher. Mais ça n'a guère d'importance, la force du propos est ailleurs, le vertige nous entraîne.
Au final, une très bonne lecture que je vous recommande chaudement.
Ma note 17.5
L'auteur a présenté son roman à l'émission de Ruquier le 23 janvier 2016.
Citations
*Je préfère l'angoisse à l'oubli, quand on est malheureux il vaut mieux le savoir, vous n'êtes pas d'accord ? (p. 20)
*"Tu vas vieillir et bientôt plus personne ne voudra de toi, disait-il. Tu as encore... quoi ? Deux ans ? Trois ans de bons devant toi ? Parce que les mecs n'en ont rien à foutre des femmes mûres. Et tu peux bien faire des thèses et des articles et de la gym, rester brillante et svelte, ça ne sert à rien si tu n'es plus côtée à l'argus. Tandis que moi, même quand tu seras moche, ridée, flasque, je serai là, et tu pourras me bénir de ne pas t'avoir lâchée." (p. 42)
*On a servi, on ne sert plus. Hier fantasme, aujourd'hui fantôme. (p. 47)
*L'écriture personnelle, ce mouvement qui va de l'intérieur vers l'extérieur pour exprimer ce qui s'est imprimé en soi -écrire pour dire son expérience, ses rêves, écrire pour dire son désir, l'attraper dans le filet des mots comme un poisson gigotant. (p. 76)
*Le désir veut conquérir et l'amour veut retenir (...) Le désir c'est avoir quelque chose à gagner, et l'amour quelque chose à perdre. (p. 170)
Je dirai malgré tout que cette vie fut belle de Jean d'Ormesson
Editions Gallimard - Collection Blanche - Date de sortie : 1er janvier 2016 - ISBN 9782070 178292 - 452 pages
4è de couv'
Pour se défendre dans un procès qu’il s’intente à lui-même, l’auteur fait défiler au galop un passé évanoui. Il va de l’âge d’or d’un classicisme qui règne sur l’Europe à l’effondrement de ce « monde d’hier » si cher à Stefan Zweig. De Colbert, Fouquet, Bossuet ou Racine à François Mitterrand, Raymond Aron, Paul Morand et Aragon. Mais les charmes d’une vie et les tourbillons de l’histoire ne suffisent pas à l’accusé : « Vous n’imaginiez tout de même pas, que j’allais me contenter de vous débiter des souvenirs d’enfance et de jeunesse ? Je ne me mets pas très haut, mais je ne suis pas tombé assez bas pour vous livrer ce qu’on appelle des Mémoires ». Les aventures d’un écrivain qui a aimé le bonheur et le plaisir en dépit de tant de malheurs cèdent peu à peu la place à un regard plus grave sur le drame qui ne cesse jamais de se jouer entre le temps et l’éternité, et qui nous emportera.
Mon avis
De l'auteur, j'avais lu trois oeuvres : La douane de mer (avec laquelle je l'ai découvert et immédiatement ajouté à ma liste de romanciers à suivre), Le rapport Gabriel (qui fait partie de mon Top 5 de tout ce que j'aie jamais lu), et Presque rien sur presque tout. J'ai toujours aimé son érudition, discrète et naturelle, parce que faisant intrinsèquement partie de lui-même. Pas un ouvrage dont je ne sois sortie plus riche de connaissances ou de références littéraires. Mine de rien, grâce à ce livre, j'ai replacé à la bonne époque un certain nombre de grands noms cités.... Mais le petit plus, c'est que j'aime infiniment l'homme au regard myosotis et malicieux. Aussi, pendant ma lecture, je l'imagine très bien sourire d'un bon mot ou d'une remarque égratignant (jamais méchamment à mon sens) tel ou tel.
Bien que quelques détracteurs, dont le détesté Yann Moix (qui est cité d'ailleurs dans ce livre !!), reprochent à Jean d'Ormesson "d'écrire toujours le même livre", j'ai beaucoup aimé ce morceau d'Histoire politique, culturelle, people aussi, du siècle dernier que nous offre là l'écrivain. Il a choisi la forme d'un procès de lui à lui pour se raconter, ce qui rompt un rythme qui eût risqué être ennuyeux sans cela et j'ai trouvé cela plutôt amusant. Par contre la partie intitulée "Il y a au-dessus de nous comme une puissance inconnue" m'a parue décalée par rapport au reste (digressions sur l'eau, la lumière, le Soleil...) et peut-être pas indispensable...
Vous l'aurez donc compris, j'ai pris beaucoup de plaisir à lire cet ouvrage, un peu comme le journal d'un jeune homme ayant traversé le XXè et nous livrant son regard perpétuellement étonné et malicieux sur la vie.
Ma note 17
Citations
*Si je suis quoi que ce soit, c'est d'abord et surtout, un tissu de contradictions. Pour reprendre une formule chère à Paul Valéry, je suis rarement de mon avis. (p. 200)
*Les hommes ne sont grands que par leurs rêves et leurs convictions. Ce qui les hisse au-dessus d'eux-mêmes, c'est la foi, la science, la beauté, le souci de la justice ou de la vérité, l'amour de la patrie ou des misérables. (p.385)
+ un très bon passage sur la différence entre le journaliste et l'écrivain (p. 339 à 342)
Quelle semaine de lecture pour moi ? #37
La semaine dernière, j'ai assez peu lu, préoccupée par mon devenir professionnel et obligée de me déplacer tous les jours.
*j'ai terminé
(cliquer sur l'image pour voir mon billet)
*j'ai lu
*j'ai commencé
Cette semaine, j'ai prévu de
*terminer : Je dirai malgré tout que cette vie fut belle de Jean d'Ormesson
*lire : Celle que vous croyez de Camille Laurens
*commencer : Café givré de Suzanne Sellfors
Marie Curie prend un amant d'Irène Frain
Editions du Seuil - Date de sortie : 8 octobre 2015 - ISBN 9782021 183061 - 349 pages
4è de couv'
Le 4 novembre 1911, un journal parisien à grand tirage livre à l'opinion cette nouvelle extravagante : "Marie Curie a un amant." A l'époque, Pierre, son mari, le savant avec lequel elle a eu son premier prix Nobel en 1903, est mort depuis cinq ans. Mais Marie a le tort d'être femme, d'être célèbre, d'être une "étrangère" (elle est d'origine polonaise), d'être "juive" à en croire certains de ses pourfendeurs (ce qui n'est pas le cas). Comme le capitaine Dreyfus vingt ans plus tôt, il faut l'abattre. Et peu importe que la célèbre veuve, qui s'apprête à recevoir son deuxième prix Nobel, soit une icône de la science mondiale. Son amant, c'est Paul Langevin, ami d'Einstein, lui aussi savant d'exception, familier des Curie aux temps héroïques. Mais Paul est marié. Et l'adultère excite la presse à scandale. Pour percer le secret qui attacha si fort Marie Curie à cet homme, au risque d'y perdre sa réputation et d'y laisser la vie, Irène Frain a interrogé des lieux méconnus, des archives négligées, des photos oubliées. Et c'est une bouleversante et inédite histoire d'amour qu'elle nous donne à lire dans ce "thriller médiatique" d'une terrible modernité.
Mon avis
J'ai été tout de suite attirée par le sujet de ce livre, car Marie Curie est une des Figures de l'Histoire que j'admire ; cependant, je craignais un peu une biographie, certes documentée, mais un peu linéaire et ennuyeuse. Eh bien j'ai été très agréablement surprise, car j'ai lu ce qu'on appelle un "roman vrai". Irène Frain dont j'ai déjà lu beaucoup de romans (Devi, Modern Style, Le Nabab, Secret de famille, ....) a une réelle habileté pour faire vivre les personnages et nous les rendre proches et attachants.
Très respectueuse d'eux, elle utilise savamment le fruit de ses nombreuses recherches, et déduit avec finesse les éventuels blancs de l'histoire qu'elle nous propose de combler. C'est fait habilement, d'une plume agréable à lire.
Sur le fond, j'ai été surprise par la "modernité" de ce lynchage médiatique orchestré par la presse de l'époque. Marie Curie réussissait admirablement dans son domaine, était une brillante scientifique, MAIS était une femme (dans un monde exclusivement masculin, à une époque fortement mysogine), une étrangère et l'amante d'un homme marié. A l'heure du scandale, tout ces "handicaps" ressurgissent, les admirateurs et collègues se défilent. Ne reste qu'un petit cercle restreint pour la soutenir. Vaillante et déterminée, elle reste debout et refuse de se laisser impressionner.
Quant à l'histoire d'amour avec Paul Langevin, je n'ai pas autant "accroché" qu'à celle avec Pierre Curie. Certes Paul a souhaité protéger sa famille et surtout ses enfants, mais je n'ai pas rencontré l'amoureux plein de panache auquel je m'attendais. Je l'ai trouvé assez opportuniste, profitant de l'aura de Marie et aussi de son argent, assez faible, passant à travers les gouttes du scandale sans dommage et créant un autre couple parallèle ensuite. Moi en tout cas, il ne m'a pas séduite !!
J'ai beaucoup aimé croiser d'aussi près les grands scientifiques qui, au début du XXè siècle, ont dessiné au fil de leurs recherches, le monde dans lequel nous vivons : les Curie et Langevin bien sûr, mais aussi Jean Perrin, l'ami admirable à qui nous devons le Palais de la Découverte et le CNRS, Paul Painlevé, Einstein... Leur passion pour la recherche, le bouillonnement intellectuel qui les animaient sont très bien rendus. Je ne sais pas si, de nos jours, la course à l'argent ne pervertit pas un peu cet enthousiasme...
Ce fut donc une vraie lecture-plaisir au cours de laquelle j'ai beaucoup appris sur cet aréopage de scientifiques mais aussi sur la période. Que demander de mieux ?
Ma note 17
Aliénor, un dernier baiser avant le silence de Mireille Calmel
XO Editions - Date de sortie : 8 octobre 2015 - ISBN 978-2845637177 - 488 pages
4è de couv'
1204. À l’heure où la majestueuse Aliénor tente une ultime fois de sauver son royaume, son fils Jean sans Terre règne sans partage sur l’Angleterre, déterminé à éteindre jusqu’au souvenir de son défunt frère, l’illustre Richard Cœur de Lion.
Traquée jusqu’au cœur de la forêt de Brocéliande, sa filleule, la belle et puissante Eloïn Rudel, descendante de Merlin et compagne illégitime de Richard Cœur de Lion, rédige pour leurs enfants les mémoires de sa vie d’aventures. Car elle est la seule à posséder l’arme capable de contrer Jean et de protéger les siens : La vérité. Comme un dernier baiser avant le silence.
Mon avis
Ah la la, quel beau roman coup de coeur ! Déjà le plaisir de retrouver Aliénor et tout son entourage, des personnages hauts en couleurs, profondément humains. Et puis la magie d'Avalon, Merlin et Brocéliande, l'histoire avec un grand H. Enfin, la plume passionnée de Mireille Calmel qui nous régale depuis une quinzaine d'années.
J'ai beaucoup aimé que ce soit Eloïn qui raconte l'histoire à sa fille Anne. Elle écrit son livre d'heures pour laisser trace de son grand amour pour Richard Coeur de Lion, avec qui elle a eu ses deux enfants. Mais c'est aussi une forme de confession pour ses erreurs, et notamment pour l'attribution d'une des Flamboyantes à Philippe son fils, à qui elle n'était pas destinée.
C'est plein d'émotions, d'aventures, on souffre avec Eloïn, on aime avec elle, on rit avec elle, on pleure aussi. Il y a des passages très émouvants, notamment la mort de Richard et celle de Loanna et Jaufré ou l'amitié avec Saladin. Le seul petit bémol, mais vraiment pour chicaner, c'est que j'aurais aimé passer plus de temps à Brocéliande...
Je vous recommande donc vivement ces pages pour leur vrai souffle épique.
Ma note 18.5
Quelle semaine de lecture pour moi ? #36
La semaine dernière, j'ai très peu lu parce que j'ai été très occupée et que, dans mes moments de calme, j'ai écrit...beaucoup, et aussi étudié le bouquin Psychologie des personnages de Howard M. Gluss et Scott E. Smith.
*j'ai lu mais pas terminé
Cette semaine j'ai prévu de
*terminer : Aliénor, un dernier baiser avant le silence de Mireille Calmel
*lire : Marie Curie prend un amant de Irène Frain et Celle que vous croyez de Camille Laurens
*commencer : Duelle de Barbara Abel
Contrepoint d'Anna Enquist
Editions Actes Sud - Collection Babel - Date de sortie : 8 janvier 2014 - ISBN 9782330 026943 - 227 pages - Traduction d'Isabelle Rosselin
4è de couv'
Au piano, une femme travaille, étudie, décrypte les Variations Goldberg, tente de comparer les différentes éditions de la partition, de s'approcher au plus près de la composition de l’œuvre de Bach, de comprendre ce qui la porte au sublime. Ainsi éclairé par la musique et en écho aux variations se déploie peu à peu en elle un paysage auquel elle n'avait ou ne pouvait plus avoir accès : les moments de joie, le quotidien, les simples détails comme les plus beaux souvenirs d'un passé partagé avec sa fille, aujourd'hui disparue.
Mon avis
J'ai acheté ce roman après avoir découvert Nicolas Godin et son nouvel album musical Contrepoint. Dans l'émission "Vous avez dit Classique ?" sur France Inter, il expliquait ce qu'était le contrepoint et en faisant une recherche plus approfondie sur Internet, je suis tombée sur la référence à ce roman.
Chaque chapitre est rythmé par une des variations Goldberg de Bach que la femme tente de rejouer, et par l'évocation de la vie de mère de la femme (qui n'aura pas de nom, comme aucun des personnages d'ailleurs), sa relation à la fille. Ainsi, une partie est très musicale et très érudite et l'autre est la vie au jour le jour, la fille qui grandit et devient autonome. La tension monte, mais à cause du spoil de la 4è de couverture, on sait déjà le drame qui surviendra au crescendo. C'est l'étude de ces pièces musicales, jusqu'à l'obsession, et la puissance réparatrice de la musique qui permettent à la femme de continuer à vivre.
Cela dit, cette construction est trop rigide et devient lassante. Quant aux personnages, difficile d'éprouver une quelconque empathie pour eux, notamment pour la mère, alors qu'on la sent en souffrance.
Bref, une lecture qui ne m'a pas emballée.
Ma note : 13.5
Quelle semaine de lecture pour moi ? #35
La semaine dernière, j'ai bien lu, des choses intéressantes et mon premier coup de coeur 2016
*J'ai terminé
(cliquer sur l'image pour lire mon billet)
*j'ai lu
*j'ai commencé
Cette semaine j'ai prévu de
*terminer : Aliénor, un dernier baiser avant le silence de Mireille Calmel
*lire : Celle que vous croyez de Camille Laurens
*commencer : Duelle de Barbara Abel
La poupée de Kafka de Fabrice Colin
Editions Actes Sud - Domaine français - Date de sortie : 6 janvier 2016 - ISBN 9782330 057831 - 259 pages
4è de couv
Au cours d'un séjour à Berlin, la jeune Julie Spieler, en quête d'une très improbable réconciliation avec son père Abel – époux décevant, séducteur impénitent, menteur invétéré et professeur de littérature allemande à la Sorbonne –, débusque la récipiendaire putative de textes inédits de Kafka, écrivain qui fascine son père jusqu'à l'obsession. La jeune fille entame alors de difficiles tentatives d'approche auprès de cette vieille dame particulièrement rétive qui porte en elle toute la mémoire d'un siècle traversé de guerres, d'exils et d'horreurs. Tous trois se retrouvent dans un chalet face au Mont Blanc afin de tenter de solder, ensemble ou séparément, tous leurs comptes respectifs.
Mon avis
Ce que j'aime chez cet auteur c'est qu'il est impossible de lui coller une étiquette, tant son talent s'exprime dans différents genres : jeunesse, fantastique, young adult... Là c'est apparemment encore une autre facette qu'il nous offre et j'adôoore ça !
Tout comme j'ai adoré ce roman qui sera mon premier coup de coeur 2016 !! C'est d'abord une très belle histoire père-fille, très sensible, sur la difficulté de communiquer, de dire les sentiments. Puis la quête et la rencontre d'Else. Est-elle réellement ou non la petite fille à la poupée, a-t-elle conservé les lettres ? De silence en mensonges, le lecteur ne sait plus très bien. Pour ma part, je me suis attachée à ces trois personnages et ai apprécié de les savoir réunis au chalet, à tenter de s'apprivoiser. Il y a de très belles pages en italique sur la vie d'Else enfant, notamment celles sur Auschwitz ; c'est évoqué avec un vrai talent, juste les mots qu'il faut. Et Kafka qui plane au-dessus de tout ça... magique !
C'est toujours difficile de parler d'un coup de coeur, alors un conseil, lisez-le et goûtez la saveur de ce roman dont l'auteur, pour moi, atteint un pallier dans sa carrière déjà bien remplie, une maturité de plume que j'aurai grand plaisir à retrouver.
Ma note 19
Citations
*Un premier coup de tonnerre ébranla l'horizon couleur hématome qui se faisait passer pour ciel. (p 54)
*Les éclairs continuaient de taillader la nuit. (p 54)
*La pluie s'entêtait, un puissant tintamarre qui faisait monter des filaments tièdes de la terre. (p 154)
*Baignée dans son lait d'étoiles, la nuit se prélassait. (p 178)
*Après un temps, même les pensées disparaissent : sans oxygène, elles se racornissent, se flétrissent et, pareilles à des orchidées de cendre, finissent par mourir. (p 180)
*Le passé est un mensonge concpcté par le présent qui souffre et puis même la souffrance finit par se lasser et le passé s'effrite, et il n'en reste que des cendres. Je souffle sur elles. (p 213)
Ce livre participe au Challenge Top 50 Livresque pour un livre publié cette année.
Challenge 2016 : Plan Orsec pour PAL en danger !
Au titre des bonnes résolutions livresques 2016, figure l'idée de faire baisser ma PAL (hep ! vous là-bas dans le fond, on ne rit pas...). Je me suis donc inscrite au Challenge proposé par Les Livres de George.
L'idée c'est de lire chaque mois, au moins 5 livres de ma PAL au 1.1.2016 qui doit tourner aux alentours de 150 livres plus une quinzaine de numériques dont 3 intégrales...
Paris est une fête d'Ernest Hemingway
Editions Folio - Date de sortie : 6 septembre 2012 - ISBN 9782070 437443 - 347 pages - Traduction de Marc Saporta
4è de couv'
Miss Stein et moi étions encore bons amis lorsqu'elle fit sa remarque sur la génération perdue.
Elle avait eu des ennuis avec l'allumage de la vieille Ford T qu'elle conduisait, et le jeune homme qui travaillait au garage et s'occupait de sa voiture - un conscrit de 1918 - n'avait pas pu faire le nécessaire, ou n'avait pas voulu réparer en priorité la Ford de Miss Stein. De toute façon, il n'avait pas été sérieux et le patron l'avait sévèrement réprimandé après que Miss Stein eut manifesté son mécontentement.
Le patron avait dit à son employé : " Vous êtes tous une génération perdue. " " C'est ce que vous êtes. C'est ce que vous êtes tous, dit Miss Stein. Vous autres, jeunes gens qui avez fait la guerre, vous êtes tous une génération perdue. "
Mon avis
Roman découvert à l'occasion des attentats du 13 novembre, à la suite desquels le slogan a tourné sur les réseaux sociaux "Paris est une fête". Comme il y a bien longtemps que je n'ai pas lu Hemingway, ce sera chose faite avec ce livre.
Ce livre est une collection de "vignettes parisiennes", des fragments de la vie de Tatie, comme l'appelait sa femme Hadley, dans le Paris des années 20. Bien entendu, ceux qui m'ont le plus intéressée sont ceux qui parlent de l'écriture, mais les sujets sont variés : les courses hippiques à Auteuil et Enghien, marotte de l'auteur pendant un temps, Paris (le jardin du Luxembourg, le quartier où vivait l'auteur, la Seine, les bouquinistes), Gertrude Stein, Ezra Pound, Scott Fitzgerald... La vie d'Hemingway était faite de hauts et de bas financiers à cette époque, mais dès qu'il avait placé quelques "contes" ou articles, il se déplaçait beaucoup. Il y a plusieurs fragments sur les séjours au ski, notamment.
Certains fragments m'ont touchée plus que d'autres, notamment celui sur la faim, son effet sur les sens qu'elle aiguise et son énergie créatrice, mais aussi la manière de la tenir à distance en choisissant de se promener dans Paris sur un itinéraire qui ne passe devant aucune boutique alimentaire ou restaurant, dont les fumets auraient fait saliver.
C'est donc une lecture qui m'a surtout plu pour les passages traitant des réflexions de l'écrivain en devenir sur le processus de création littéraire. La construction en "vignettes" m'a interessée en ce qu'elle donne une photographie de l'univers et de l'entourage de l'écrivain.
Ma note 15
Extraits
*Je pensais (...) "ce qu'il faut c'est écrire une seule phrase vraie. Ecris la phrase la plus vraie que tu connaisses." Ainsi, finalement, j'écrivais une phrase vraie et continuais à partir de là. C'était facile parce qu'il y avait toujours quelque phrase vraie que j'avais lue ou entendue ou que je connaissais. Si je commençais à écrire avec art, ou comme quelqu'un qui annonce ou présente quelque chose, je constatais que je pouvais aussi bien déchirer cette fioriture ou cette arabesque et la jeter au panier et commencer par la première affirmation simple et vraie qui était venue sous ma plume. (p 51)
*Paris était une très vieille ville et nous étions jeunes et rien n'y était simple, ni même la pauvreté, ni la richesse soudaine, ni le clair de lune, ni le bien, ni le mal, ni le souffle d'un être endormi à vos côtés dans le clair de lune. (p 89)
*Quand j'écrivais quelque chose, j'avais besoin de lire après avoir posé la plume. Si vous continuez à penser à ce que vous écrivez, en dehors des heures de travail, vous perdez le fil et vous ne pouvez le ressaisir le lendemain. Il vous faut faire de l'exercice, fatiguer votre corps, et il vous est alors recommandé de faire l'amour avec qui vous aimez. C'est même ce qu'il y a de meilleur. Mais ensuite, quand vous vous sentez vide, il vous faut lire afin de ne pas penser à votre oeuvre et de ne pas vous en préoccuper jusqu'au moment où vous vous remettrez à écrire. J'avais déjà appris à ne jamais assécher le puits de mon inspiration, mais à m'arrêter alors qu'il y avait encore quelque chose au fond, pour laisser la source remplir le réservoir pendant la nuit. (p 99)
*C'était une histoire très simple intitulée Hors de saison, et j'avais volontairement omis d'en raconter la fin, c'est à dire que le vieillard se pendait. Cette omission était due à ma nouvelle théorie, selon laquelle on pouvait omettre n'importe quelle partie d'une histoire, à condition que ce fût délibéré, car l'omission donnait plus de force au récit, et ainsi le lecteur ressentait plus encore qu'il ne comprenait. (p 117)
La légende des Pendragon d'Antal Szerb
Editions Viviane Hamy - Date de sortie : 8 mars 2012 - ISBN 9782878 585063 - Traduction de Natalia Zaremba-Huzsvai et Charles Zaremba
4è de couv'
1933. János Bátky, installé depuis quelques années en Angleterre, est un intellectuel hongrois travaillant comme assistant scientifique ou archiviste. Fasciné par le peuple et la noblesse anglaise, il passe tout son temps libre dans les bibliothèques à étudier essentiellement les Mystiques du XVIIe siècle et les Rose-Croix - " [qui] diffèrent en cela des Franc-Maçons, que leurs réunions étaient encore plus secrètes et qu'on sait encore moins ce qu'ils y faisaient " -. Un soir, il fait la rencontre du Comte John Alistair Pendragon qui possède dans son château une formidable bibliothèque contenant de nombreux ouvrages sur l' " occulte ", dont l'accès est quasi impossible. Le comte invite néanmoins János à venir découvrir son auguste demeure et à éplucher ses rayonnages de livres rares. Janos reçoit alors un appel anonyme le dissuadant de s'y rendre, seulement sa décision est prise et l'occasion trop belle, il partira pour le Pays de Galles, il découvre vite que le château est en fait le théâtre de faits inquiétants et mystérieux...
Mon avis
Cet ouvrage m'a été envoyé dans le cadre de mon abonnement à Exploratology (chaque mois, on reçoit un livre choisi par Marjorie, plus un sachet de thé et des petits cadeaux...).
Pour moi, le mot Pendragon s'attachait à la légende arthurienne, mais là, rien à voir si ce n'est que le roman se passe au Pays de Galles.
Difficile de parler de ce roman, sorti en 1934, tellement il y a de façons de l'aborder : un roman d'aventures, un roman érudit, un roman-gothique, voire un peu foutraque... Toutes ces facettes servies par des personnages hauts en couleur : Janos lui-même dont on comprend qu'il a grand à voir avec l'auteur, Osborne "l'héritier" et ses rêves de conquête, Cynthia à qui Janos fait un brin de cour, le connemarien à double face Maloney, la sulfureuse Eileen, sans oublier les gardes de nuit, fantômes et autres créatures bizarres. Assasinats, société secrète, expériences, monstres, fantastique... il y a tout cela, vous dis-je.
C'est bourré d'humour, notamment de petites phrases assassines sur les femmes "les femmes me roulent toujours. Il y a des moments où elles se conduisent exactement comme si elles étaient des êtres humains" et de second voire troisième degré, tout en étant d'une érudition folle. Beaucoup de symboles et de sens caché.
Bref, inclassable, mais assez réjouissant pour que je vous le recommande. Un bémol "technique" qui tient à l'éditeur : la couverture, tellement fine, qu'à peine le livre entr'ouvert, le dos est "cassé".
Ma note : 16.5
Ce livre participe au Challenge Top50 Livresque pour un livre recommandé par une amie.