Editions de Minuit - Date de sortie : 4 septembre 2014 - ISBN 978-2707323859 - 372 pages
Résumé
Rencontrer une fille tatouée au Japon ; sauver la vie d’un homme sur un paquebot en mer du Nord ; nager avec les dauphins aux Bahamas ; faire l’amour à Moscou ; travailler à Dubaï ; chasser les lions en Tanzanie ; s’offrir une escapade amoureuse à Rome ; croiser des pirates dans le Golfe d’Aden ; tenter sa chance au casino en Slovénie ; se perdre dans la jungle de Thaïlande ; faire du stop jusqu’en Floride.
Le seul lien entre les personnages est l’événement vers lequel tous les regards convergent en mars 2011 : le tsunami au Japon, feuilleton médiatique donnant à tous le sentiment et l’illusion de partager le même monde. Mais si tout se fond dans la vitesse de cette globalisation où nous sommes enchaînés les uns aux autres, si chacun peut partir très loin, il reste d’abord rivé à lui-même et à ses propres histoires, dans l’anonymat.
Pourquoi - comment ce livre ?
Pour le thème et pour l'auteur dont j'ai lu plusieurs romans que j'ai aimés.
Les premières pages en 3 minutes
Mon avis
Dans ce livre-là, on fait le tour du monde avec les personnages qui n'ont a priori aucun lien, si ce n'est l'unité de temps. Ils sont loin de chez eux, en déplacement, le jour du tsunami de Fukushima en mars 2011. Une juxtaposition de petites histoires, de gens qui vivent leur petit quotidien "égoïste", alors même qu'une catastrophe est en cours. Leurs vies sont présentées comme des cartes postales, mais des cartes postales intelligentes, bourrées de réflexion, sur eux-mêmes, sur leur place dans ce grand mouvement qui nous anime, ce carroussel ininterrompu qu'est la vie, enfin, pas si ininterrompu puisque Fukushima leur rappelle leur condition d'humains, mortels.
J'ai adoré ce roman qui va vite, qui nous embarque sur de longues phrases, comme s'il y avait urgence à tout dire. Et les transitions d'une histoire à l'autre sont subtiles comme des vagues qui nous entraîneraient inexorablement à un autre endroit de la planète. Par exemple, on est avec Taha et Yasemin nageant avec les dauphins aux Bahamas, et l'auteur écrit : "rien ne pourra interrompre la quiétude de ce moment dont ils garderont longtemps la trace, bien après leur retour à Istambul, alors que le soir même, à peine débarquée, il n'y aura en revanche pas une seconde de quiétude ni d'apaisement pour Salma...." Ca y est, on est déjà un pied dans l'histoire suivante !
Il y a du souffle dans ce roman-là qui est pour moi, un coup de coeur que je vous conseille évidemment..
Citations
*Un appareil photo déclassifie le voyageur et le range de facto parmi les touristes, et parmi eux, au bas de l'échelle, le touriste qui croit vraiment qu'il fait oeuvre et accumule de quoi nourrir l'imaginaire de l'humanité par ses observations et la pertinence de ses découvertes.
*Pour les Massaï d'aujourd'hui, les touristes, les Blancs, les Land Cruiser et les téléobjectifs font partie du monde comme des objets dont on s'accomode, puisqu'on sait que plus jamais on ne vivra sans leur regard braqué sur nous.
*Les jeunes hommes, dès qu'ils ont une quinzaine d'années, sont envoyés loin du village pour qu'ils apprennent la prodigalité et la modestie afin d'affronter et d'appréhender la vie.
*Le passé ne passe pas et s'ankylose dans sa vie de tous les jours. Comme si c'était à cause de lui, le passé, que les vieux étaient si lourds et si lents à déplacer, à force de se déposer comme un limon, dans toutes les strates du corps.
* Plus il réfléchit, plus il se dit que c'était une erreur parce que, quand on part si loin de chez soi, ce qu'on trouve parfois, derrière le masque du dépaysement, c'est l'arrière-pays mental de nos terreurs.