exil

Dans Lecture

La ballade du calame - Atiq Rahimi

Par Le 06/10/2016

Edition L'iconoclaste - Date de sortie : 26 août 2015 - ISBN 9782913 366763 - 183 pages

4è de couv'

« L’exil ne s’écrit pas. Il se vit. 
Alors j’ai pris le calame, ce fin roseau taillé en pointe dont je me servais enfant, et je me suis mis à tracer des lettres calligraphiées, implorant les mots de ma langue maternelle. 
Pour les sublimer, les vénérer. 
Pour qu’ils reviennent en moi. 
Pour qu’ils décrivent mon exil. »
Ainsi a pris forme cette ballade intime, métissage de mots, de signes, puis de corps.

Mon avis

Magnifique et intelligent, ce court livre dans lequel l'auteur médite sur l'exil, l'éloignement de sa terre d'enfance !

J'aime par-dessus tout les livres qui nous apprennent quelque chose et avec celui-ci j'ai été servie. Il est émaillé de citations qui à chaque instant me donnaient envie de fouiller, d'aller plus loin que le texte lui-même. Il y a, entre autres, des lignes très belles dans le chapitre "Va t'en" sur le premier exil, lorsque l'enfant quitte le corps de la mère.

Que l'auteur évoque son errance ou ses callimorphies, c'est intime, profond, poignant, mais en même temps lumineux. Un livre-doudou (je ne trouve pas d'autre mot) que je ne pourrai pas prêter, que je garderai à portée de main, en cherchant pourquoi il m'a autant touchée, quel est mon exil à moi. Mais aussi il m'a interrogée sur mon rapport au geste d'écrire, que j'aime tant (j'écris avec un précieux stylo plume), à cette trace que je laisse de moi.

C'est inclassableau-delà du coup de coeur et il va sans dire que je vous le recommande ++.

Citations

*Enfants, nous sommes tous des Shéhérazade. Nous inventons des contes non pas pour passer le temps, mais pour survivre. (p. 50)

*Comme tout exilé, je suis un homme d'ailleurs. (...) Ailleurs, c'est l'espace de mon errance. Là où se perd mon corps : je suis là où je ne suis pas. Là où s'avedent mes souvenirs, mes rêves, mon désir... (p. 180)

*La calligraphie est un geste de l'esprit, la callimorphie, une geste du désir. (p. 161) 

*La calligraphie a des règles. C'est une discipline, une grammaire, une langue, une idée, un texte. Rien de tout cela en callimorphie. Celle-ci est sauvage, sans loi ; sa langue est corporelle, le mouvement est sa grammaire ; il n'y a aucune idée, mais des sensations. (p.164)

Ma note 17

L'auteur  

Dans Lecture

Les amants de la Mer Rouge de Sulaiman ADDONIA

Par Le 19/05/2013

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Editions Flammarion - 2009 - 305 pages - Traduit  de l'anglais par Anne Guitton

Résumé

Djeddah, fin des années 80. Naser est un jeune Erythréen de vingt ans que les troubles politiques dans sa terre natale ont forcé à émigrer en Arabie saoudite où, pour gagner sa vie, il lave les voitures. Là-bas, les femmes sont cachées sous leurs voiles et les hommes ont les pleins pouvoirs. Seule prévaut la justice des riches et des puissants. Naser grandit dans un climat brutal et ses moindres faits et gestes sont épiés par la police religieuse tandis que sa vie est rythmée par les sermons stridents de l'impitoyable imam de la mosquée locale. Jusqu'au jour où il reçoit - sacrilège - un mot d'amour écrit par une inconnue. Bravant les chefs religieux et politiques, Naser décide de vivre cette passion, tout en sachant qu'il risque sa vie s'il venait à être découvert.

Les Amants de la mer Rouge est l'histoire d'un amour interdit, dans une Arabie Saoudite brûlante et tyrannique, une passion universelle et moderne tout à la fois.

Mon avis

J'ai lu ce roman en une journée, tellement l'histoire m'a accrochée. Amour impossible en Arabie saoudite, entre une jeune saoudienne et un réfugié érythréen dans un pays où la condition féminine est mise à mal, "un pays en noir et blanc" comme dit Nasser (le blanc des thobe et le noir des abaya).

Bien que décrivant un univers dur et brutal, ce n'est pas un lamento, un roman qui juge ; simplement une belle histoire où les deux amants attisent, à leurs risques et périls, la toute petite étincelle de bonheur qui s'offre à eux, avant une séparation inéluctable.

J'ai trouvé ce roman magnifique dans sa retenue, sa pudeur et quand même dans l'espoir qu'il a pu apporter aux jeunes gens. L'espoir fait vivre dit-on....